Critique ciné: "Guilty of Romance" + "Rock Forever"

Izumi, femme au foyer et bientot trente ans au compteur, reve de changement. Mariée à un célèbre écrivain, sa vie n'est que répétition de taches serviles et sourde incomprehénsion. Lassée par ce désert conjugal, elle décide un beau jour de sortir, et trouve un travail au sein d'un marché. Là, elle se fait repérer par une directrice de casting, qui lui reconnait une grande beauté. Acceptant la proposition, Izumi se laisse petit à petit entrainer dans une suite d'évenements érotiques qui vont radicalement bouleverser son existence monotone...

Descente aux Enfers vertigineuse et sans concession, "Guilty Of Romance" est un de ces objets cinématographiques si communs au pays du Soleil Levant et déconcertants pour un public occidental non-initié, d'une liberté de ton frappante et à la démarche jusqu'au-boutiste. A travers le destin d'une femme au foyer désespérée se livrant progressivement aux plaisirs de la chair, le cinéaste nippon Sion Sono propose un "pinku eiga" surprenant, qui aborde la question de l'objectification de la femme dans ses deux extremes: à la fois fantasme et modèle de pureté, l'heroine se retrouve prise entre deux roles dans lesquels la socièté moderne la case inexorablement. Une quete identitaire et d'indépendance qui ne se fera pas sans heurts, qui grace à un scénario retors, démarre sur une intrigue policière glauque à souhait, révelant l'autre facette d'un film mariant dépravations en tout genre. Si les quelques outrances du film peuvent plomber le propos (saturation du cadre avec des couleurs fluos, omniprésence de la musique, surjeu typique), le film n'en demeure pas moins un exercice de style réussi et mémorable, qui ne prend jamais son sujet avec des baguettes.

Hollywood, 1987. C'est ici que débarque Sherrie, native de l'Oklahoma, venue réaliser ses reves de chanteuse. Fraichement débarquée, elle rencontre Drew, jeune artiste qui vit en tant que barman au Bourbon Club, la scène rock n' roll la plus branchée du coin. Les deux individus aux yeux embrumés par leurs reves de gloire travaillent au sein du mythique établissement et ne tardent pas à tomber amoureux, tandis que l'annonce de la venue de Stacee Jaxx, le "dieu du rock" pour une représentation exclusive, echauffe les esprits...

"High School Musical" a fait déjà beaucoup (trop) d'émules, et les producteurs hollywoodiens commencent à voir leur panel démographique favori passer la puberté à toute allure. Voici donc "Rock Forever", portage ciné d'un musical autrement délirant plus adulte et branché que le dernier filon Disney, spectacle calibré d'un coté pour émoustiller la fibre émotionelle des plus de treize ans, et de l'autre pour réveiller aux plus vieu le souvenir d'une décade de décadence emblématique. Bienvenue dans la fin fantasmée des 80's, ou le rock est arrivé à son pinacle, menacé par la morale bien-pensante et les diktats de l'establishment qui dénatirent la musique en business racoleur. C'est dans ce milieu fécond et allumé que démarre l'idylle de deux jeunes tourtereaux, entourés d'une bande de doux siphonnés proclamés résistants du rock. Gentiment sulfureux histoire de ne pas troubler la ménagère, "Rock Of Ages" (titre vo) se vautre lorsqu'il reprend des tubes d'époque version édulcorée en mode lip-synch flagrant. Il nous désarme aussi par ses excès de guimauve et de romance mielleuse, dignes d'un soap-opéra télé baveux. Il réussit cependant à emballer le temps de quelques numéros musicaux dynamiques, et de créer une ambiance sympathique au coeur de son microcosme rocknrollesque, au coeur duquel Alec Baldwin, Russell Brand, Tom Cruise et Paul Giamatti, non contents de briller dans leurs roles respectifs, poussent la vocalise. Après avoir porté "Hairspray" sur grand écran, le très capable Adam Shankman s'offre une nouvelle fois des tetes connues pour un résultat certes mi-figue mi raisin, mais tout de meme suffisamment bien huilé et audacieux pour qu'on passe un bon moment.

En bref: "Guilty Of Romance" est une fiction à la fois apre et sensuelle, nourrie par ces deux mamelles quasi-indissociables que sont le sexe et la violence. Un drame social fourni en scènes de haute tension, porté par un casting au poil: qui malgré ses quelques outrances artistiques et sa fin un peu longue, réussit à nous emporter dans sa fascinante spirale destructrice. A ne pas mettre entre toutes les mains.

Note: 14,8/20

En bref: Sans etre l'une des attractions les plus monumentales que le cinéma ricain nous ait proposé récemment, "Rock Forever" se défend tout de meme plutot bien, enquillant par moment les purs moments de folie musicale, contrebalancés par une mièvrerie romantique lénifiante. Entre les deux, le film epine à trouver un juste milieu, mais l'on passe tout de meme un bon moment grace une bande-son bien choisie et des prestations en roue libre.

Note: 13,8/20